Vous avez certainement entendu parler des Vezo, ces pêcheurs semi-nomades emblématiques du Sud-Ouest de Madagascar qui ont, jusqu’à ce jour, réussi à préserver leurs traditions millénaires tout en s’adaptant, tant bien que mal, aux défis modernes actuels. Le territoire de ce peuple s’étend sur une frange côtière de près de 300 kms, entre Belo-Sur-Mer et le sud de Tuléar.
Une communauté fascinante au gré de sa “mer” nourricière
Les peuples maritimes marins sont extrêmement rares de nos jours, pour ne pas dire en voie de disparition, les derniers répertoriés étant les Badjao en Indonésie. Comme ces derniers, le peuple Vezo maîtrise à merveille l’art de la natation, de la plongée et de la chasse sous-marine.
Issue d’une longue et forte tradition, ces gitans marins vouent à la mer une histoire d’amour sans fin et se considèrent comme faisant partie des créatures de l’océan, au même titre que les poulpes, les requins et les oursins. Depuis des générations, ces derniers tirent toutes leurs ressources de la mer et leur vie est rythmée par les vents et marées, la pêche et la navigation à bord de leurs pirogues à balancier, témoignant ainsi de la fragilité et de l’exception de leur communauté.
Les caractéristiques de la pirogue Vezo
La pirogue Vezo est très caractéristique et s’apparente de près à celle de ses ancêtres d’origine indonésienne. Sa fabrication demande un vrai savoir-faire, qui est transmis de génération en génération. Elle mesure de 2 à 8 mètres de long et sa coque est creusée dans un bois très léger, le farafatse, qui rappelle d’ailleurs le balsa. Elle est souvent peinte de couleurs vives et est reconnaissable par sa voile carrée, faite de sacs de riz rapiécés, et par son balancier qui assure l’équilibre général.
Véritable outil de travail pour ces pêcheurs, la pirogue est utilisée pour la pêche mais également pour le transport des personnes et des marchandises, tout au long de ce lagon côtier, voire même en-dehors afin d’accéder à des lieux de pêche plus éloignés. Sa voile, d’habitude tendue entre deux mâts, sert également comme tente de protection pour leur campement.
La Pêche Artisanale
La pêche artisanale, issue de techniques héritées de leurs ancêtres, est pratiquée depuis des millénaires par ces semi-nomades marins. Ces derniers se sont toujours lancés dans des voyages allant jusqu’à plusieurs centaines de kilomètres pour trouver les meilleures zones de pêche. La connaissance de la mer et de la direction des vents font ainsi partie de leur patrimoine. En fonction, ils peuvent alors soit partir en pleine nuit ou encore à l’aurore.
Les pêcheurs Vezo ne partent jamais seuls mais toujours en équipe. En effet, l’entraide est le maître mot dans cette communauté fascinante. Lorsque ces derniers arrivent dans ce qu’ils ont défini comme étant la zone de pêche, ils baissent les voiles et mettent leurs pirogues en position. Les plus jeunes sont alors ceux qui plongent au fond, afin de repérer les bancs de poissons, dans le but de les encercler et les diriger en les poussant vers la poche au bout du filet. Les autres pêcheurs du groupe, restés en surface, les suivent à la rame et tapent sur leur pirogue avec leur pagaie pour appâter les poissons. Une fois faits prisonniers dans la poche, les marins du Sud-Ouest de Madagascar tirent fort sur les mailles du filet, à plusieurs bras d’hommes, afin de sortir leurs prises hors de l’eau.
Ces nomades de la mer peuvent aller jusqu’à 6 mètres en apnée, voire 12 mètres. La plongée se fait très souvent sans bouteille d’oxygène, avec juste un masque et, parfois, un tuba et des palmes de piètre qualité pour ceux qui ont la chance d’en avoir.
Le retour de pêche
Le partage de la pêche suit un rituel bien précis, à savoir que la moitié des poissons revient au propriétaire des pirogues et tout le reste est partagé entre les pêcheurs et les autres familles de l’île où ils ont établi leur campement temporaire. Les poissons les plus chers à la vente sont les marguerites mais chaque poisson pêché représente un véritable trésor pour eux.
En effet, il arrive assez souvent que les vents soient forts et la mer mauvaise, et de ce fait, que la pêche ne soit plus possible pendant plusieurs jours. Tributaires de la météo, ces gardiens de la mer, qui connaissent pourtant parfaitement l’océan, sont alors obligés de rester sur l’île. C’est alors au tour des femmes d’assurer la seule source de nourriture qui provient du récif, lorsque celui-ci est découvert sur des centaines de mètres pendant la marée basse. Dans ce cas, ce sont les femmes qui ont la charge d’aller récolter délicatement les crustacés remplis de vitamines, harponner les poulpes cachés entre les blocs de coraux ou encore ouvrir les oursins avec une pierre et de récupérer la chaire à l’intérieur. Ces produits sont séchés ou salés avant d’être consommés par les pêcheurs et les familles du village. En cas de surplus, ils peuvent aussi être commercialisés frais ou encore être échangés contre diverses denrées sur les marchés locaux de la côte continentale.
Toutefois, depuis quelques années, les pêcheurs Vezo ont remarqué une pénurie de poissons à cause, notamment, de la pêche intensive et des gros bateaux qui viennent rafler les fonds au large des côtes malgaches. Face à ces géants, les poissons n’ont pas le temps de se reproduire, obligeant alors ces semi-nomades à se rendre plus au large, à bord de leur frêle embarcation rudimentaire. Or les journées en mer sont cruciales pour ces gitans des mers. Bien que le risque soit conséquent pour eux, il en va de leur survie alimentaire et de celle des familles de l’île (à suivre prochainement…).
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Rédigé par Valérie Andréas pour Mad Caméléon
*Photographie adaptée sous Licence CC-by-nc-sa par https://www.flickr.com/photos/geolis06/
*Photographie adaptée sous Licence CC-by-sa par Marie Salichon
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